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vendredi, 02 octobre 2015

Qui est Tariq Ramadan

Six choses que l’on ignore au sujet de Tariq Ramadan

Tariq Ramadan est de retour… Après une période de relative absence dans les médias français, et après ses déboires aux Etats-Unis et aux Pays-Bas, il fait à nouveau la pluie et le beau temps sur le petit écran, où on lui donne généreusement la parole, en le laissant présenter de lui une image avantageuse et trompeuse. Le présent article vise à donner quelques éléments d’information et de réflexion pour ceux qui ne savent pas (encore) qui est vraiment Tariq Ramadan.

 

1. Sa famille

 

Il est bien connu que Ramadan est le petit-fils du fondateur de l’organisation des Frères musulmans, Hassan al-Banna. Mais on ignore généralement que la famille Ramadan joue un rôle essentiel dans l’histoire du mouvement islamiste, depuis trois générations. Al-Banna, le grand-père, a créé le mouvement des Frères musulmans, qui est la matrice de l’islamisme contemporain, à laquelle se rattachent à la fois le Hamas palestinien et aussi (de manière moins directe) la nébuleuse Al-Qaida. Said Ramadan, le père, beaucoup moins connu, a joué un rôle essentiel dans l’implantation des Frères musulmans en Europe. C’est lui qui a créé l’Internationale islamiste, au cours de ses périples incessants (Pakistan, Israël, Arabie saoudite, Allemagne, Suisse…). Tariq Ramadan est un acteur important de la réislamisation des populations musulmanes et de l’islamisation de l’Occident.

 

2. Sa jeunesse

 

Né en 1962 à Genève, Tariq Ramadan a connu une enfance dorée en Suisse. Son itinéraire est – comme pour de nombreux autres militants islamistes – celui d’un born again muslim, c’est-à-dire d’un musulman revenu sur le tard à sa religion. Contrairement à son père et à son grand-père, en effet, il n’a pas été élevé dans le strict respect de la tradition et son cursus scolaire a été presque totalement profane. Comme il le reconnaît lui-même dans un livre d’entretiens, la religion ne tenait pas une place importante dans sa jeunesse. Jusqu’à l’âge de 30 ans, il était un citoyen suisse de confession musulmane, beaucoup plus intéressé par le football que par l’islam ou la politique… Il a même envisagé un temps de devenir footballeur professionnel.

 

3. Sa rencontre avec Hassan Tourabi

 

Une des rencontres décisives, qui a décidé de son avenir, fut celle du leader islamiste soudanais, Hassan Tourabi. Francophone, Tourabi accueille le jeune Ramadan, auquel il promet un brillant avenir. Il aura une influence durable sur celui-ci, notamment concernant l’idée de « l’islamisation par le haut » (c’est-à-dire par le biais des élites) et aussi par son recours au double langage. Quelques années plus tard, en 1991, le leader islamiste soudanais accueillera un autre dirigeant islamiste, encore inconnu du grand public : Oussama Ben Laden.

 

4. Ses amis et réseaux d’influence

 

Tariq Ramadan est passé maître dans l’art de se créer des réseaux d’influence (qu’il appelle des « partenariats »). Parmi ces réseaux, figurent notamment celui des chrétiens de gauche (dont plusieurs ont avoué leur erreur après avoir compris qui était vraiment Ramadan, comme Christian Delorme), certains altermondialistes et plusieurs islamologues ou journalistes, comme François Burgat ou Alain Gresh, rédacteur en chef du Monde diplomatique, qui est resté jusqu’à aujourd’hui un des plus fidèles soutiens de Ramadan dans les médias français.

 

5. Son mentor, le cheikh Qaradawi

 

 

Parmi les théoriciens de l’islamisme qui ont le plus influencé Tariq Ramadan – outre son père, Said Ramadan, et Hassan Tourabi – figure le cheikh Qaradawi. Animateur d’une émission très suivie sur Al-Jazira, ce décisionnaire de l’islam proche des Frères musulmans s’est exilé au Qatar, après avoir été expulsé d’Egypte. Il a été interdit de séjour aux Etats-Unis (tout comme Ramadan) en raison de ses liens avec la banque Al-Taqwa, affiliée à Al-Qaida. Il est surtout célèbre pour avoir autorisé les attentats-suicides contre des civils israéliens, y compris ceux commis par des femmes (précisant que la femme kamikaze « peut même retirer son voile pour mener l’opération [suicide], car elle s’apprête à mourir pour la cause d’Allah et non pas à exhiber sa beauté »… Ramadan ne s’est jamais démarqué des positions extrémistes de Qaradawi, qui est en fait son véritable mentor politique.

 

6. Ramadan et les convertis

 

La femme de Tariq Ramadan, Isabelle, est une convertie. Ce point pourrait sembler anecdotique, mais il ne l’est pas du tout. Les convertis jouent en effet un rôle essentiel dans la stratégie islamiste de conquête de l’Occident, comme je l’ai montré dans mon dernier livre. Tariq Ramadan, comme son mentor Qaradawi et comme d’autres dirigeants islamistes, consacre une grande partie de sa propagande (da’wa) à destination des convertis potentiels, et plus généralement du public occidental non musulman. Un fait récent en témoigne : pendant de nombreuses années, Tariq Ramadan a publié ses livres chez des éditeurs musulmans spécialisés (comme l’éditeur Taw’hid de Lyon), touchant essentiellement un public musulman. Depuis quelques années, il publie des ouvrages s’adressant à un public beaucoup plus large, chez un éditeur qui a pignon sur rue à Paris, les Presses du Châtelet. Cela traduit sans aucun doute un changement qui n’est pas purement commercial, mais stratégique.

 

L’analyse du parcours de Tariq Ramadan et de son discours montre qu’il n’est pas un « réformiste » ou un réformateur de l’islam, mais qu’il poursuit la stratégie de conquête entamée par Hassan Al-Banna et par Said Ramadan, dont il est l’héritier et le continuateur. Le premier avait fondé, à travers l’organisation des Frères musulmans, une « avant-garde » de l’islam politique conquérant, aspirant à prendre le pouvoir en Egypte et dans les pays musulmans. Le second avait déplacé le combat islamiste vers l’Europe, anticipant avec beaucoup de lucidité l’importance grandissante des populations musulmanes installées en Occident. Tariq Ramadan, quant à lui, poursuit le même combat, en l’habillant d’un discours trompeur, et en prenant pour cible de sa propagande tant les musulmans d’Occident que les non-musulmans, convertis potentiels ou compagnons de route de l’islamisme militant.

 

Paul Landau

 

Pour en savoir plus :

 

Parmi les nombreux ouvrages consacrés à Tariq Ramadan, je recommande celui du journaliste Lionel Favrot, Tariq Ramadan dévoilé. Je renvoie aussi à mon livre, Le Sabre et le Coran, Tariq Ramadan et les Frères musulmans à la conquête de l’Europe (éd. du Rocher 2005).

03:27 Écrit par Bonnes Nouvelles dans F o r u m | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook